Témoignage sur la gestion durable du site de Hauteroche

Le développement durable appliqué au sport de montagne et à l’escalade plus particulièrement doit répondre aux trois points de sa définition (protection de l’environnement, justice sociale et progrès économique).

La CFME (Commission Fédérale Montagne Escalade) au sein de la FSGT (Fédération Sportive et Gymnique du Travail) soutient les clubs pour promouvoir un équilibre entre ces trois axes.

La FSGT participe depuis des années à la mise en place d’initiatives, parmi lesquelles, la gestion de la falaise de Hauteroche, reposant sur les acteurs suivant :

  • La Mairie (propriétaire du site : falaise et aire aménagée pour le bivouac) nous soutiens pour gérer au mieux dans l’intérêt de tous les utilisateurs des lieux.
  • La LPO (Ligue de Protection des Oiseaux) coordonne la sauvegarde d’une aire de reproduction du faucon pèlerin dans une zone regroupant 5 voies d’escalade interdites à la grimpe du 15 février au 15 juin de chaque année. Un arrêté préfectoral a été mis en place au printemps 2018.
  • L’ONF nous aide dans la gestion des arbres le long de la falaise et des foyers sur l’aire aménagée pour le bivouac. Un arrêté préfectoral datant de 2017 interdit tous feux à moins de 200 m d’une forêt du 15 juin au 15 octobre de chaque année. En dehors de cette période, un aménagement spécifique de quatre foyers “historiques” a permis qu’ils soient tolérés, tous autres foyers “sauvages” n’aura plus lieu d’exister et seront systématiquement démontés.
  • La FSGT assure la gestion du site (sentier d’accès, falaise et aire aménagée pour le bivouac).

La FSGT, par son fonctionnement associatif essaye d’agir dans les trois axes :

La protection de l’environnement :

  • Une aire aménagée pour le bivouac (toilettes sèches, panneau d’affichage, zone délimité pour faire des feux de camp) proche de la falaise incite à vivre l’escalade en milieu naturel le temps d’un week-end. La sobriété des infrastructures (absence d’eau courante, toilettes sèches, accès à pied à la falaise, absence de confort coûteux en énergie) engendre un faible impact environnemental de l’activité une fois sur site.
  • Les formations fédérales d’initiateur d’escalade SNE abordent un module spécifique à l’éco-responsabilité pour sensibiliser les futurs animateurs dans les clubs.
  • Annuellement, la fête de la falaise organisée à Hauteroche, conviviale et éducative, est également l’occasion de prendre conscience de la fragilité du milieu.
  • L’éducation à l’environnement et à une pratique responsable même si elle a ses limites, semble porter ses fruits car depuis quelques années les grimpeurs ont compris qu’il n’était pas dans leur intérêt de laisser une falaise «sale» derrière eux. Malgré une fréquentation grandissante, la falaise reste globalement très propre sans avoir eu besoin d’investir dans des poubelles ni un entretien coûteux du site qui aurai nécessité d’envisager un quelconque péage, montrant ainsi la faisabilité d’une pratique aux coûts faibles (environnementaux et sociétaux).

La justice sociale :

S’appuyant sur une vie associative prônant l’implication de chacun-e-s, la maintenance du site fait uniquement appel à la participation de bénévoles (un week-end à l’automne est dédié à l’entretien de la falaise et un autre à l’amélioration de l’équipement des voies). Son coût ainsi minimisé, combiné à un accès à des aménagements peu coûteux, permet d’être supporté par la vente de topo et un petit budget fédéral. L’accès gratuit à la pratique de l’escalade en milieu naturel devient finançable.

Le progrès économique :

Même si son accès est gratuit, la falaise participe à la revitalisation de l’économie locale en attirant des grimpeurs et des touristes qui ont besoin de se loger, de se nourrir (pique-nique, restaurent, cave, etc…), de se déplacer (train, carburant), de se faire plaisir (artisanat local, restaurant, etc…). Et bien sûr la fête de la falaise organisée chaque année conjointement par des habitants du village et des grimpeurs d’Île de France ont des retombées économiques car les produits consommés sont généralement locaux.

Cependant des interrogations subsistent sur le plan de la durabilité :

  • Une telle gestion résistera-t-elle aux évolutions juridiques de la responsabilité des gestionnaires de site suite à l’affaire de “Vingrau” ?
  • La normalisation des équipements de falaise et la surenchère sur le matériel sous prétexte de sécurité ne risquent-elles pas de démotiver les gestionnaires et les équipeurs de falaise.
  • L’augmentation des coûts de gestion des falaises ne va-t-il pas fragiliser l’équilibre actuel de leurs financements ?
  • Combien de temps les efforts de sensibilisation et de responsabilisation resteront-ils à la hauteur d’une population grandissante de grimpeurs ?
  • Si la population des grimpeurs/consommateurs augmente trop par rapport à celle des grimpeurs autonomes et responsables, combien de temps l’action des bénévoles suffira-t-elle ?
  • Même si les aménagements sont conçus de sorte à minimiser leur impact sur l’environnement, combien de temps le coût énergétique et environnemental de l’accès aux sites naturels restera t-il supportable par notre biosphère ?
  • Le développement durable est-il viable au vue qu’un développement s’opposer à une durabilité ?